22.1.05

Leur fatigue et le gobelet, la pub et le maître

Il est très tard.

Je viens de passer un temps fou à changer le "Template" de ce blogue-là. Et d'y mettre les liens. Celui de Raphaële est amusant, car elle ne dispose pas d'internet à Boromo, c'est donc un non-blogue.

Quand tu te promènes à Tokyo, tu vois des voitures alignées sur le bas-côté d'un boulevard, moteur allumé. Dedans, des gens qui dorment. Des ouvriers, des "salarymen", des jeunes femmes. Qui dorment. Parce qu'ils sont fatigués. Le moteur est allumé pour faire fonctionner la climatisation, la radio, je ne sais pas. Ils dorment parce qu'ils sont fatigués. Ils ont raison, s'ils sont fatigués. Ils sont tellement fatigués. Overwork.


Hier soir donc, j'étais ivre. Ito-san m'avait convié à boire des coups. Ito-san, il bosse pour la boîte de production du spectacle. C'est lui qui m'avait accueilli à Tokyo. Et pour une fois qu'un Japonais me propose d'aller boire des coups, j'ai accepté grave. Nous sommes allés à Aoyama, dans le bar de Hide-san, dans lequel j'étais déjà allé une fois. Cette première fois, je lui avais, éméché, promis de lui rapporter un autographe de Takako, sur un gobelet en carton. Je lui ai rapporté le gobelet signé. Il était très content, nous avons même fait une photographie.

Là, je raconte que Takako, l'actrice principale du spectacle, une femme charmante au demeurant, est une star au Japon. Chanteuse et actrice, essentiellement de fictions télévisuelles, plus que de cinéma, je crois. Elle fait aussi des photographies. Et c'est une vedette.

Une action anti-pub à Tokyo, ce serait un délire absolu. Il y a de la publicité PARTOUT à Tokyo. Notre fameux écran à cristaux liquides de la Tour Montparnasse, exemplaire unique, si je ne m'abuse, de publicité animée à Paris, ferait ici figure de tablette d'argile à caractères cunéiformes. Non, ici, c'est d'écrans numériques que je parle, avec des films publicitaires, et le son qui va avec. Grands comme les 4 X 3 Decaux, voire plus, postés à 15 mètres du sol. Qui te prennent la gueule, les oreilles, les yeux, le cerveau.

En japonais, une oreille se dit "mimi".

"MIMI", c'est une oreille.

Depuis deux jours, je prends la pause du soir avec quelques collègues japonais. Ils m'emmènent ici ou là. C'est bien agréable. Ils me font manger des choses. C'est chouette, de manger des choses. J'aime bien manger des choses.

L'emballage. Être au Japon, c'est emballer tout. Un sac en plastique pour ci, un sac en plastique pour ça, le tout dans un autre sac en plastique.

Le travail de théâtre est organisé comme le travail de cinéma en France. La division du travail, les catégories, au nom d'une efficacité sans pareille. Et toujours la précision. Il faut voir l'accessoiriste se précipiter sur le plateau dès que le metteur en scène dit "stop", pour préparer la reprise de la scène. Oui, comme au cinéma. Tout le monde assiste à la répétition, les régisseurs notent tout, tous les détails. L'équipe, dans son ensemble, est réunie pour ce projet, et pas pour un autre, jusqu'à preuve du contraire, et cette économie du détail (la détaille, dit Derrida) est sensible partout. Je ris, et parfois les fais rire, de me plier (ou pas) à cette précision. En tout cas, on est en plein théâtre de "maître". Toute l'économie du truc est posée sur le "director", qui décide de tout, absolument tout. Un théâtre que je tâche de combattre dans mon travail, basé sur l'équation suivante : "metteur en scène = artiste, acteur = interprète + outil de l'artiste". Bon, pas de scandale, et pas forcément spécifiquement japonais bien entendu. Mais je vis ça.

Je suis très content d'être au Japon.

C'est rigolo, parce que "Tchin-tchin", en japonais, ça veut dire bite. Alors on rigole bien quand on trinque.





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